09 janvier 2008

Soldons !

Chaque année voit renaître la méthode commerciale la plus courue qui soit, c'est-à-dire l’appel aux consommateurs à l’aide du mot solde. En soi, il sous-entend de bonnes affaires et donc la possibilité de se vêtir et se chausser à moindre coût. Aussi étonnant que cela me puisse me paraître, les dites soldes semblent se contenter des ventes textiles et peu des autres domaines. Pourtant, bien des secteurs se servent du support médiatique de la période pour s’y inviter de manière détournée : l’automobile, l’électroménager, tout est supposé être soldé, tout doit se vendre à coups de pourcentages fracassants étalés sur des affiches et des pancartes si grandes qu’il est impossible ou presque d’y échapper.

Si l’on y regarde de plus près il y aurait à redire sur la méthode tant celle-ci est digne d’une forme d’hypocrisie de la part des commerçants et fabricants… légalement il est interdit de « vendre à perte », en substance on n’a donc pas le droit de vendre moins cher que son prix d’achat. Prenons un exemple : un vêtement est acheté par le commerçant 10 euros auxquelles on ajoutera la TVA, ce qui donnera un prix final théorique de 11.96 Euros. Bien sûr, ce calcul présente une absence de marge, ce qui donnera plutôt un prix de vente final d’environ 20 Euros (admettons…) d’on on déduira la taxe. Une fois ce prix connu, on sait donc que le vendeur ne peut pas descendre son tarif sous le prix de 11.96 Euros. Alors d’où sortent ces 50% ? Du portefeuille des acheteurs précédents qui ont payés une forte marge. Ne critiquons pas trop, il s’agit là d’une méthode classique où chacun sait ce qu’il fait, et qu’à présent peu de commerçants agissent malhonnêtement car les prix sont tout de même surveillés. Enfin bon, pourquoi ne pas vendre honnêtement dès le départ ? Je dois être trop naïf ou trop communi… passons.

Revenons donc sur les ventes tierces je vous prie. Pourquoi se limiter aux fringues civiles alors qu’un équipement militaire pourrait tout aussi bien porter des mentions « soldé » ou « -30% » pour les gros acheteurs ! Imaginez un peu le catalogue des grandes manufactures d’armes affichant prestement « Catalogue des soldes d’hiver 2008 ». Cela aurait un petit goût comique puisqu’on annoncerait ainsi « Tuez pour moins cher ». Je sais, c’est cynique, méchant, infâme pour ceux qui subissent le feux de ces armes… mais pourtant nous agissons de la même manière mais sans toute la fanfare télévisuelle inhérente aux périodes de solde. Que deviennent les armes plus ou moins usagées, que fait-on de ces fusils et autres équipements déclarés obsolètes ? On les ferraille ? Pas du tout ! On agit comme tout bon commerçant usant de la démarque (ce qui signifie ôter la marque d’un produit pour le vendre moins cher suite à un défaut de fabrication ou pour un modèle démodé) en changeant les emballages et marquages sur ces fusils et en supprimant proprement l’estampille de nos usines. Pratique, peu cher, on équipe donc bien des nations avec nos armes, et puis finalement il n’y a pas de petit profit !

Bon, il est vrai qu’agir de la sorte peut donner des situations fort désagréables tant pour nos soldats que pour nos alliers du moment. Les Argentins par exemple (cliquer ici pour une petite histoire du missile Exocet) furent de bons clients pour nos déclassés et même notre matériel moderne, et nul doute que les marins Anglais n’ont probablement pas dû apprécier la plaisanterie de prendre un missile sur un de leurs navires. Dégât collatéral du commerce international répondra l’économiste. Et que dire des Russes se faisant tirer dessus à coup de Kalachnikov? Pour information, ce cher AK 47 (Avtomat Kalashnikov) est le fusil d’assaut le plus vendu au monde : Entre 70 à 110 millions d’unités produites depuis 1947 (date de sa première mise en service et lui servant de code version). Fabriqué hors de l’URSS sous licence, cette arme est aujourd’hui la préférée des guérillas et des terroristes. De quoi faire râler les stratèges de l’ancienne armée rouge, non ?

Ce qui m’amuse finalement le plus, c’est qu’on prenne encore les clients pour des imbéciles en leur vendant n’importe quoi à n’importe quel prix, et qu’en plus on leur vende pardessus tout une bonne affaire. Voir une telle foule se piétiner, se battre pour le dernier article, écouter ces gens se disputer pour un prix, j’en viens à confirmer que les périodes de soldes donnent raison aux publicitaires qui nous matraquent. Il ne manque au fond qu’un courageux pour afficher ouvertement « Pigeons ? Oui vous l’êtes, mais pas plus qu’ailleurs ! »

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