10 novembre 2008

Enervement professionnel

Si l’est un domaine où les nerfs sont mis à rude épreuve c’est bien celui de nos emplois. Compressés, maltraités tant par le calendrier que par une hiérarchie aussi vaine que malfaisante rien n’est moins reposant que travailler. Pourtant, dans notre entêtement de fourmi besogneuse satisfaite de sa tâche nous nous attelons à réussir et à respecter des engagements que d’autres prennent pour nous. Alors, un jour (ou le cas présent un soir) on s’arrache les rares cheveux qui ont survécu à la calvitie et l’on se sert de ses affaires comme de défouloirs supposés personnifier l’engeance qui se targue de réussir à votre place, et qui vous colle ses échecs sur votre dos.

« Ca ne fonctionne pas ! » s’écrie l’acharné qui retourne le même problème depuis des heures. Les yeux plissés sur son métier il grogne, peste, se martèle les tempes de frustration et prie un dieu en lequel il n’a pas foi de lui accorder l’illumination. Vexé par la stagnation notre pauvre victime de son métier s’échine alors à rechercher ses propres erreurs, convaincu qu’il est que le hasard n’est pas une variable acceptable dans ses progrès professionnels... Et c’est le drame : tout concorde, tout semble conforme aux demandes et pourtant le petit rien qui met tout de guingois reste là, fier de sa propre inutilité tout en étant l’inévitable piège à cerveau. « Et pourquoi faut-il que cette merde me fasse chier alors que je suis prêt à partir ?!!! Connerie de saloperie de ... de merde ! », marmonne avec sang-froid celui s’enlise inexorablement dans les méandres de l’incompréhensible.

Furieux, tentant de se contrôler tant bien que mal, je suis là à l’affût d’une cause pouvant provoquer ces foutus effets inappropriés. C’est supposé fonctionner en dix secondes et cela prend dix minutes... Allez, ce n’est rien, on refait et on recommence, ça va mieux fonction.... ET MERDE ! Encore une fois tout est vain, tout est vide, tout le dispositif s’est ligué pour que ma paranoïa latente réapparaisse de plus belle. Un clic, deux clics, on remet d’aplomb, et paf encore une erreur inconnue au bataillon. Telles des puces se reproduisant sur le dos d’un chien pouilleux les problèmes se multiplient à une vitesse folle. Ai-je bien vérifié les paramètres ? Me suis-je bien assuré que tout est là où c’est supposé l’être ? Je ne perçois pas d’anomalie, je compare même avec ce qui était là avant et aucun écart ne me brûle la rétine. J’étais certain de mon coup et rien, rien de rien ne fonctionne comme prévu. Là, ce n’est plus une frustration, nous passons au domaine du supplice : combien de temps ce bazar va-t-il encore se jouer de mes nerfs ?

Petite pause, on respire les vapeurs tant de nicotine que de caféine, on discute, on s’ouvre aux collègues pour demander leur aide et tous réagissent de la même manière : « Ca devrait être bon en effet ». Ben non, ça ne l’est pas, mauvaise pioche ! Quitte à s’énerver autant le faire pour ne pas mourir idiot et découvrir le fin mot de l’histoire. On reprend tout depuis le début, on épluche ce qui est supposé être monolithique et donc fiable dans l’espoir de prendre en défaut un tiers et pouvoir lui coller sur le dos toutes les misères du monde. Peine perdue, en revenant précisément sur ce qui avait été fait tout était bon, rapide et fiable.

On se lamente, on se sent petit, dépassé par les évènements, un enfant devant la confiserie fermée pour cause de faillite. Alors là, rien n’est plus pareil : les yeux se troublent, les mains se ferment sur l’air et l’on envisage la destruction de l’environnement de travail avec une coupable délectation. « Vengeance ! » hurle l’âme fatiguée, « Violence ! » réclame les nerfs mis à rude épreuve. Malgré toutes les tentatives de maîtrise de soi la rage monte patiemment en soi... puis d’un coup l’on voit un petit, tout petit message marqué en rouge, l’erreur classique qui se tapit face à vous mais que même le fauve le plus rapide du monde n’aurait vu. La voilà, la faute de frappe coupable, la garce qui vous tient en haleine des heures durant et qui vous libère en dix secondes montre en main. Colère ? Frustration ? Envie de meurtre ? Pas tout à fait : juste une frénétique envie de s’envoyer la tronche contre le bureau !

SALOPERIE !

Aucun commentaire: