10 mars 2010

Big badaboum !!!

Oh, la belle jaune ! Oh, les étincelles ! Oh, c’est joli, ces flammes !

Non, je ne suis pas devenu amateur de feux d’artifices, encore moins de spectacles pédant et prétentieux comme savent en concocter les mairies lors des célébrations du 14 juillet, ou de toute fête supposée importante pour la foule des futurs électeurs. Il est de notoriété publique que ces cérémonies ont plusieurs buts, dont ceux d’écluser les excédents de mauvaise bière, d’assourdir les mouflets qui vous traînent dans les pattes, de légitimer le commerce des pétards arraches-phalanges, et enfin de faire croire à la populace que les élus se préoccupent d’eux. Non, là je songe au spectacle du même type, mais en version dantesque, le style « Je fais du grand spectacle, que même Hollywood il peut pas le faire » (réflexion d’un généralissime quelconque, au fin fond d’une jungle localisée dans une république bananière).

Alors quoi ? Mais la musique des orgues ! Ceux de Staline je veux dire. Vous ne savez pas ce que c’est que cet instrument de musique ? Ca n’a rien de bien étrange, étant donné que tant l’objet que le personnage sont bien lointains des considérations des personnes modernes, à qui la guerre a eu la gentillesse de se tenir à plusieurs milliers de kilomètres de là. Donc, pour les béotiens et autres non passionnés des batailles, les orgues de Staline sont un lanceur multiple de roquettes, dont la forme des tubes est si caractéristique qu’elle semble inspirée d’un orgue de cathédrale. A forme originale, fonction originale ! Les orgues en question lancent « au pif » ses roquettes, le tout dans un vacarme très caractéristique. Les plus mélomanes ont même décrétés que c’étairnt « les orgues des enfers », chose qui n’est pas à prendre à la légère sur le champ de bataille. Bref, là, c’est du lourd, du concret, du bourrin comme pouvait l’aimer le dictateur (nabot soit dit en passant). Il est certes exact qu’il soit difficile d’intégrer la chose à un philharmonique, mais, mine de rien, présentez vous avec la bestiole où que ce soit, et vous serez accueilli avec un respect autrement plus conséquent, qu’en vous présentant avec un bouquet de fleurs par exemple (quoique : de jolies violettes offertes à une femme aimée, ça serait déjà plus de circonstance, non ?)

L’ingénierie humaine n’a de cesse de m’épater, notamment pour créer des spectacles démesurés. Ah ça, le cirque bidule, il fait petit bras avec son clown canon face à la détonation de la bombe H ! C’est que ça dépote sec, la fission de l’atome de plutonium ! Bon, j’admets aussi que cela fout la frousse de se dire que la chose pourrait vous vaporiser plus rapidement que n’importe quelle autre catastrophe naturelle, mais reconnaissez tout de même que le champignon atomique n’a rien de semblable sur terre. A vrai dire, une telle démonstration de puissance de la science a de quoi vous encourager à dire… Plein de choses, allant du « Wahou ! Ca dégage sec ! » au « Bande de fous ! ». Notez aussi qu’il faut finalement peu de choses pour intimider l’adversaire, quelque soit celui-ci. Les étoilés rouge au marteau et à la faucille, face aux étoilés blanc, ils se tenaient la dragée haute de cette manière, non ? Comme quoi : un beau feu d’artifice à but politique, ça s’avère pas si stupide que ça pour impressionner les foules.

Et le monde est ainsi : si ça ne fait pas Boum, et ce en version cinémascope XXL avec le son qui va bien, personne ne s’en préoccupe. Le vol d’une flotte de bombardiers rasant Dresde, c’est quand même plus photogénique que du tir ultra ciblé à courte distance ! Il faut sidérer madame la ménagère de moins que 50 balais pas encore ménopausée, et faire frémir la testostérone de monsieur de moins de 50 piges encore capable de s’envoyer la bonne. Graveleux, dites-vous ? Parce que ça sert à quoi, les défilés militaires, les parades, les uniformes, l’apparat, la quincaillerie qui pend au revers des vestons des anciens combattants ? A faire trembler la fibre patriotique, à exciter l’imagination des plus dignes d’entres nous ! Jusqu’à preuve du contraire, un troufion ne se trimbale pas avec ses décorations qui cliquètent sur sa vareuse. S’il a deux doigts de jugeote, tout ce qui brille et fait du boucan sera gentiment entreposé dans sa cantine, dans sa base, bien loin de son théâtre d’opération ! Mais il faut bien rappeler au monde que « On a des tanks, des canons, des tas de trucs qui font boum, plaf, bing, pan t’est mort, et que si tu me marches sur les godasses, je te les distribue franco de port dans la tronche ! ».

Afga bidule, Irak chose, Paki truc… C’est où tout ça ? Pour nous autres, civils plus préoccupés de notre futur cancer, ou par le cours du pétrole qu’on engouffre dans nos bagnoles, ces pays sont loin, il y fait chaud, et puis quoi, on va pas s’intéresser à tout c’est déjà bien assez compliqué de joindre les deux bouts merde ! Nous sommes quand même décevants, parce que les états se mettent en frais, et ce en permanence, pour nous offrir du cinéma de grand spectacle à tous les JT du PAF ! Ne boudez pas votre plaisir, car tout y est vrai : les tripes, le sang, la haine, les larmes, les victimes sont authentiques, les pleurs ne sont pas doublés par un obscur intermittent du spectacle. Et les militaires qui y agissent ne sont pas de ceux qui vous jouent de la comédie. Ils ne sont pas Tom Hanks du « soldat Ryan », ils sont de ceux qui font ce qu’on leur demande, que la cause soit juste ou non. Alors, regardez, méditez, profitez du carnage, car, après tout, c’est la meilleure manière de saisir toute la bêtise humaine, mais aussi, et ce dans le grand paradoxe de l’âme, d’une humanité sans borne.

Finalement… Les politiques ont raison de donner du feu d’artifice dans les petits patelins : ils préparent toutes les générations au théâtre (d’opération), et ainsi, ils préparent les oreilles des marmots à la prochaine guerre, où qu’elle soit. Qui a dit « A quand les orgues de Staline pour fêter le 8 Mai » ?

Je file en sifflotant avant de me faire alpaguer…

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