23 mars 2010

Elle est belle la jeunesse numérique!

Qu’on ne m’affirme pas que la jeunesse est un bienfait, et encore moins qu’elle permet de former les esprits malléables pour financer nos retraites. La jeunesse, c’est l’antithèse du progrès, c’est l’opposition avec l’ordre établi, quitte à aller à l’affrontement sous toutes ses formes. Etre jeune, ce n’est certainement pas envisager le lendemain, mais avant tout raisonner sur le présent à très courte échéance. Pourtant, nous espérons, dans notre élan de parents (ou potentiellement parents), que les générations futures seront raisonnables, raisonnées, bien éduquées, et qu’elles sauront être à la hauteur de nos espoirs. Pourtant, nous ne sommes pas spécialement plus porteurs des réussites d’aujourd’hui, que le furent nos ancêtres à leurs époques respectives.

C’est dramatique : le jeune n’a pas plus de visibilité sur son avenir, qu’une taupe en a dans son trou exigu. Je ne saurais les blâmer, tant il est vrai que nul n’est oracle, et qu’au surplus le monde des adultes a ce don de tout réduire à la destruction, ou au nettoyage par le vide. Ainsi, les espoirs candides des adolescents sont souvent les regrets des adultes confrontés aux réalités de leur temps. Pourtant, qu’il est beau de les voir fantasmer sur un monde équitable, de les entendre déblatérer des lieux communs proto communistes, de savoir qu’ils voteront social à 18 ans, et capital à 35... Mais là, ce n’est qu’un des aspects de la jeunesse, celui le plus séduisant, celui des idéaux, celui qui est le premier à s’effondrer quand le monde extérieur entre en collision avec la bulle de rêves des jeunes.

Méchant ? Cynique ? Oui, c’est vrai que je vois ceci avec le regard de celui qui a dû mettre au placard bien des espérances… Comment ça, vous ne me croyez pas quand j’exprime l’idée que j’avais foi en l’homme, que je lui donnais une chance de se sortir de son bourbier ordinaire ? Certes, l’existence ne m’a que rarement donné l’occasion d’appréhender un avenir rose bonbon, mais pour autant que je sache, tout ado espère, même si cela dépend complètement de son petit monde. Je doute que les rêves d’un afghan soient les mêmes que ceux d’un parisien par exemple. Et à tout cela s’ajoute notre monde tel qu’il est aujourd’hui. Certains sont fiers de nos progrès : le réseau partout, les communications instantanées, que d’améliorations du quotidien ! Ah bon ? Laissez moi rire !

« Mais pourquoi va-t-il encore râler !? » se dit l’observateur. PARCE QUE ! Bon, je peux être plus pondéré, et vous dire que je suis souvent de mauvaise humeur, mais là, je suis même limite inquiet pour ces jeunes qui n’ont plus de crainte concernant la technologie, à tel point qu’elle en devient un véritable poison. Tenez, on nous tanne avec les profils Facebook, les Twitters, et consoeurs. Pour la plupart des reliques que nous sommes, ces bidules semblent à la limite de l’inutile, ou tout au plus un autre moyen de remettre la main sur de vieilles connaissances. Pourtant, d’un point de vue plus jeune, Facebook (pour ne citer que l’exemple le plus inquiétant) représente le maillage de tous les amis, de toutes les connaissances, à tel point qu’il devient incontournable de se connecter à son profil pour « apprendre les dernières news de ses potes ». Tout ça pour ne pas se rencontrer ? Tout ça alors que le collège, le lycée, ou la Fac permettent déjà de le faire au quotidien ? J’ai du mal à suivre le raisonnement.

Mais poussons l’analyse plus avant. Facebook contient, telle une base de données de la police, ou plus précisément de la Gestapo, des informations aussi importantes que votre adresse, votre orientation sexuelle, votre présence (ou non) chez vous, et j’en passe. Bien entendu, cela peut être laissé vide, de sorte à s’assurer un minimum d’anonymat. Or, l’ado, lui, n’a pas cette formation concernant sa vie privée. A ses yeux, quelle importance d’aller piocher qu’un tel est homo, qu’un autre aime fumer de l’herbe, ou qu’un troisième couche avec X ou Y. Ce sont des moyens d’investigations énormes ! Demain, celui qui met la main sur un profil facebook pourra retrouver tous les contacts (amis) de la personne ciblée, et donc, techniquement, impliquer les dites personnes dans une enquête de « moralité ».

L’avenir ? J’ai la grosse crainte que nombre de moyens d’enquêtes à travers le réseau deviennent des outils de répression ordinaire. Je n’ai que peu de confiance dans la neutralité de ces services, d’autant plus qu’ils sont assurés par des entreprises mercantiles. Si un état leur impose de fournir les informations, je les vois mal refuser… Enfin bon, étant réfractaire à ces machins, je me sais déjà condamné par mes propos ici même. De toute façon, nous savons tous qu’il nous faut faire attention à ce que nous laissons traîner sur le réseau. La candeur des adolescents doit être pondérée par la méfiance des adultes. Et c’est là que je dis « Jeune et con ? Non, plutôt jeune et inconscient ».

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