18 mai 2010

Espionnage

S’il est un sujet sensible au niveau des états, c’est bien celui de l’espionnage. Il est de notoriété publique que le principe du secret est inhérent au fonctionnement même des nations, car celui-ci couvre énormément de choses : les stratégies politiques, économiques et/ou militaires, les éventuelles négociations peu glorieuses avec des états infréquentables, ou encore l’activité paranoïaque (à tort ou à raison) consistant à surveiller nos propres alliés. Dans ces conditions, nul doute que l’espionnage est, hélas, une chose inévitable dans notre monde moderne. Je suis pourtant le premier à dire qu’il s’agit là d’une violation manifeste de nos droits fondamentaux, que ce sont des méthodes inacceptables en démocratie, et qu’il est particulièrement scandaleux de financer des opérations malsaines de désinformation, de propagande éhontée, ceci pour couvrir des tractations de coulisse… Et pourtant…

Je n’aime pas l’idée d’être surveillé, encore moins d’être éventuellement la cible de services obscurs capables de me cataloguer pour mes propos. Je n’aime pas plus l’idée que l’on puisse ficher les gens sous prétexte que nous sommes des menaces potentielles, tous tant individuellement que collectivement. A contrario, peut-on accepter de laisser sans surveillance une population où, par le jeu des opinions et des mouvances, des groupes terroristes, des actions d’espionnage finissent toujours par être menées ? Bien sûr que non ! Aurait-on accepté que les services de l’état restent complètement abasourdis et dans l’inaction après un attentat sur le territoire Français ? La réponse ne saurait laisser planer le doute : la foule légitimera les travers de l’espionnage, à condition que ceux-ci permettent d’éliminer les menaces qui planent sur elle. Convenons en honnêtement, car prétendre le contraire, c’est se voiler la face, et croire, tel un enfant, que « tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil ».

Nombre de personnes mettent en accusation les états pour leurs actions souterraines : écoutes téléphoniques, détournements d’informations, voire même assassinats commandités à l’étranger. Qui saurait tolérer de telles exactions ? Les états ! Aussi ignoble que cela puisse paraître, l’exécution d’une personne peut, malheureusement, représenter une solution efficace à des perspectives atroces. Ce sont des choix cornéliens : si le terroriste potentiel X n’est pas abattu, ne va-t-il pas plastiquer une rame de métro, ou gazer un centre commercial ? Si l’on embastille pas tel chef d’une mouvance religieuse, ne va-t-il pas réitérer le massacre de l’OTS ? C’est à ce genre de questions que sont confrontés les services secrets. Qu’on soit légaliste, démocrate, ou quoi que ce soit imprégné par une fibre idéologique un tant soit peu libertaire, force est de devoir admettre que la liberté peut parfois se payer au prix fort… Très fort même.

Certains parlent des relations entre la DGSE et Clotilde Reiss. Certains vont même jusqu’à supposer que les accusations Iraniennes à son sujet étaient quelque peu trop proches de la vérité. Soit. Peu me chaut de savoir si, oui ou non, la demoiselle en question a été formée par la DGSE. Cela ne me concerne pas, pas plus que cela m’intéresse de savoir ce qu’elle a pu transmettre. La seule question qui se pose, à mon sens, est de savoir s’il était intelligent de faire autant de battage autour de sa personne, et qui plus est d’aller jusqu’à l’inviter à l’Elysée. Me concernant, la réponse est non, car il s’agit là d’un demi aveu qui doit satisfaire l’Iran. Il sera, dès lors, impossible de revenir en arrière, quand bien même s’il s’avérait qu’elle n’avait aucun lien avec les services d’espionnages Français. Tout est une question d’apparence, et, à ce jour, elles sont plutôt contre elles. Je suis aussi dérangé par le principe de croire que la France soit là à croire que nous ne surveillons pas les autres nations : pourquoi la France n’userait-elle pas de l’information comme d’une arme ? Savoir ce qui se passe en Iran, c’est également prendre la température du moyen Orient. Connaître les réactions réelles de la population, hors de toute dramatisation médiatique, c’est également connaître l’orientation politique de la foule. De ce fait, suggérer que nos services secrets ne connaissent pas la réalité du terrain par le truchement de témoins directs, c’est donc envisager que la France n’a pas d’yeux ni d’oreilles. Ce qui est absurde.

Enfin, certains s’offusquent déjà du pseudo échange de « prisonniers politiques » fait entre la France et l’Iran. Ridicule. Ces deux états négocient probablement le problème depuis des mois, et l’occasion faisant le larron, la France se sera réfugiée derrière le fait que la peine des deux détenus Iraniens soit arrivée à leur terme. Depuis que la diplomatie existe, les échanges, les embrouilles sont légion, et me faire avaler que nous ne négocions pas, c’est essayer de me faire croire que le monde est différent de ce qu’il est réellement. Le monde fonctionne selon des principes élémentaires de leviers : « j’ai un détenu de chez toi, tu en as un de chez moi. Trouvons un moyen de s’entendre sur les conditions à réunir pour nous les échanger ! » Clotilde Reiss est l’exemple même de l’épine dans le pied du quai d’Orsay : un ressortissant Français prisonnier dans une dictature avec laquelle nos relations sont minables… Population Française qui exige qu’on sauve la « victime » (qui, soit dit en passant, n’est pas innocente à sa propre situation), une pression internationale permanente sur l’Iran concernant le dossier du nucléaire, et vous obtenez alors ça… Un échange qui ne dira jamais son nom. Minable ? Non, indispensable, hélas…

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