20 mai 2010

Lettre ouverte à ceux qui défendent la patrie

C’est arrivé près de chez vous, et vous ne voulez pas que cela vous concerne. Vous ne vous sentez pas responsables, car, après tout, ce n’est pas vous qui êtes impliqué dans l’incident. Moi, je me sens responsable, coupable même, parce que je suis qu’un de ces types ordinaires qui se moquent du quotidien, et qui n’ont aucune honte en détournant le regard quand ça les arrange.

Une mère de famille est morte. Elle a été abattue par des malfrats en fuite. Elle est tombée en faisant son métier de police municipale, un service conçu pour nous autres, ceux qui ne veulent pas prendre de responsabilité. Elle est morte plus jeune que je ne le suis, elle laisse derrière elle des gens, une famille, des amis, des proches, et tout cela, nous autres, nous nous en foutons. Honte à nous. Nous sommes des salopards qui n’ont pas de respect ni de dignité, et j’ai envie de hurler de colère quand j’ai le malheur de lire ou d’entendre des propos du genre « C’est le risque du métier ». Le métier, c’est assurer notre sécurité, répondre à nos attentes, pas d’être abattu en pleine rue par des types trimballant des armes de guerre et des explosifs ! On peut ne pas aimer l’idée d’un état policier, d’être épié en permanence, on peut également refuser avec force les débordements d’une police avec de trop grands pouvoirs (se souvenir des CRS voltigeurs aident à remettre le débat sur les rails). En revanche, tolérer la mort d’un agent de police, municipale ou non, c’est déjà accepter un état de non droit, un monde où les gâchettes décident à notre place. Et ça, je m’y refuse.

Je suis furieux, triste, et écoeuré. J’ai envie de gueuler à cette foule indifférente que tous, individuellement et collectivement, ils sont responsables du drame. Oui, tous nous devons porter le fardeau des dérives de notre société. Tous, nous devons supporter le poids de la honte de laisser de telles choses se produire. Je maudis les salauds ayant tiré, je les hais avec la force de la colère d’un citoyen qui croit qu’une nation ne doit pas être dirigée par la terreur des brutes, mais par l’intelligence des éclairés. Je suis de ceux qui n’éprouveraient aucune pitié à l’idée de les voir enfermés à tout jamais. Je suis deux, enfin, qui pensent qu’il ne faut pas faire preuve de faiblesse et qu’il faut avoir le courage de ses opinions.

Humainement, était-elle une femme bien ? Etait-ce une idiote en uniforme ? Quelle importance ? Autour de la tombe, c’est le respect pour le défunt qui doit primer, c’est aussi de se souvenir du pourquoi de sa mort. Elle a défendu la population, elle y a laissé sa vie, et nous nous devons de respecter cela. Pourtant, est-ce qu’il y aura une marche silencieuse pour son souvenir ? Est-ce qu’on va honorer sa famille d’un « merci » chargé de tristesse ? Je doute qu’on voie un tel rassemblement qui serait pourtant mérité. Pourquoi les gens honorent la mémoire des ordures, des voyous ? Pourquoi fait-on d’un Mesrine un héros faussement révolutionnaire ? Pourquoi, a contrario, un agent de la force publique peut-il mourir dans l’indifférence générale ? Des jeunes fuient un contrôle, ils se tuent en roulant comme des dingues : une émeute pour accuser l’état d’homicide. Un policier se fait tuer, pas de réaction épidermique de la foule. A vomir. J’ai envie de vomir rien qu’à l’idée que des ordures puissent envisager d’encenser les tueurs !

A vous, familiers de cette femme, à vous tous, amis et proches, je vous dis mes sincères condoléances. Je ne la connaissais pas, je ne sais même pas comment elle se prénommait. Sachez simplement que j’estime de mon devoir de citoyen de respecter sa mémoire, d’exiger qu’on arrête, et juge avec toute la rigueur indispensable ces criminels, et que vous, en deuil, ayez tout le respect qui vous est dû.

C’est arrivé près de chez moi. Je suis passé juste à côté du lieu de la fusillade quelques minutes après les évènements. Je n’ai rien vu, je n’ai été mis au courant que par hasard. Et si j’avais été impliqué ? Blessé ? Ou pire ? Je crois que je suis reconnaissant à cette femme et à ses collègues d’avoir défendu nos intérêts collectifs, et mes intérêts personnels : avoir le droit de vivre dans un pays en paix, de ne pas avoir à craindre une fusillade.

Merci, et bon courage.
L'information sur liberation.fr
Un citoyen.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Un petit commentaire additionel sur cet excellente analyse du sujet "Burqa" de la part d'un revennant des Emirats...

De quoi parle-t-on au juste ? La "Burqa" est un habit traditionnel Afghan, qui est une sorte de combinaison de toile avec une "grille" à hauteur du visage pour que son "occupante" puisse quand même voir où elle met les pieds...

Une autre variante est le "neqtab". Là il s'agit d'un voile noir qui masque l'ensemble du visage à l'exception d'un fente à hauteur des yeux, toujours pour laisser la possibilité à la femme qui le porte de voir ses petons... Le Neqtab lui est utilisé dans les pays du GCC.

Et puis il y a LES voiles.

En général un tissu qui repose sur les cheveux en chignon.

Chez les Algériens, il masque les cheveux et le cou.

Aux Emirats, le voile est un morceau de tissus noir que les femmes utilisent en se masquant soit l'ensemble du visage (le tissus est assez transparent), soit les cheveux.


Pourquoi ces précisions ? Parce que l'amalgame est fait dans les médias concernant ces différents voiles et que l'on regroupe le tout sous la dénomination Burqa... Or, il me semble que toutes les femmes portant un voile sans que le visage ne soit caché ne pose absolument pas de problême.... Foutez leur donc la paix plutôt que d'aller interviewer une femme portant un voile simple pour lui demander si ça lui a posé des problêmes dans son travail ou non. Elle n'est PAS concernée ni par la loi, ni par un quelconque pb autre que le traditionnel refus de la différence et le rejet lié à sa différence.....

Une autre élément à apporter au débat est le postulat comme quoi le voil est un outil d'oppression de la femme. Autant je peux le concevoir dans le cadre des Talibans et de leur conception rétrograde de la gente féminine. Autant, j'ai vu une utilisation du voile toute différente aux Emirats. La bas, le voile est un outil pour la femme. Quand elle souhaite être à l'abris des regards, elle couvre sa tête et rabat le voile sur son visage. Cet anonymat lui permet de ne pas avoir à supporter des regards parfois insistants de la gente masculine. A contrario, lorsqu'elle souhaite se montrer, ou séduire, ou lorsqu'elle se considère en "sécurité", là elle va se dévoiler en montrant son visage, voire porter son voile en écharpe en dévoilant sa chevelure. On en voit tous les jours dans les malls (centre commerciaux), dans les restaurants, dans des espaces de loisirs. Ici, le voile est un élément de coquetterie, il est généralement décoré de strass et paillettes, coordonné avec l'abaya (la tenue noire portée au dessus des jeans de marque, des hauts griffés et des talons aiguille....). Le voile pour les Emiratis n'est donc pas un outil d'oppression de la femme, mais au contraire un outil au service de la femme....

Anonyme a dit…

Suite...

(J'espère qu'il y a tout.... limite a 4096 caract..... arf....)

La loi proposée en France fait une généralité d'un élément de l'habillement des femmes musulmanes en faisant des raccourcis et en prennant un postulat général sur un sujet qui est complètement différent d'un pays à l'autre. Comment voulez-vous réduire à un texte de loi des situations qui sont générées par DES cultures qui parfois prennent naissance à des milliers de kilomètres de distance !

Le sentiment malsain que celà me donne est qu'il s'agit une fois de plus d'une position qui ne prend pas en compte les peuples concernés mais cherche plutôt à se focaliser sur la population musulmanne dans son ensemble alors que la problématique de l'oppression des femmes n'est effective qu'auprès des islamistes radicaux.

Un exemple assez révélateur est l'argumentaire développé par MAM lors de l'interview accordée aux JTs : L'interdiction ne portera que sur l'utilisation de la burqa dans les espaces publics. Quel bel exemple de sa connaissance du dossier : les Burqas et autres voilent ne s'utilisent QUE dans les lieux publics. Arrivées chez elles, les femmes musulmanes (hors radicaux) tombent le voile et son habillées sous l'abaya comme vous et moi....(voire mieux... les Emiraties ont les moyens et sont de véritables Fashion victim). Interdire le voile à l'extérieur est donc pour elle une imbécilité totale....

Alors que faire ? Oui, il faut combattre l'atteinte aux libertés des femmes sur notre sol et ailleurs. Mais sincèrement, je pense qu'une femme peut être complètement oprimée par son marri sans pour autant porter un habit particulier... Les statistiques de violences conjugales le démontrent aisément. Condamner les "burqas" et les "Neqtab" me parait être une bonne idée si cela s'intègre dans une action de défense de la femme et de sa dignité. Et celà ne se révèle pas forcément uniquement par le tissus... L'habit ne fait pas le moine dit-on chez nous ? Je connais des femmes qui sont vénérées par leur marri et qui ne concoivent pas leur vie sans leur voile. Doit-on les interdire de séjour sur notre territoire ?

Ce qui est certain, c'est que la tolérance de nos mode de vie et de nos tenues vestimentaires dans les pays musulmans risquent de se trouver justement remise en cause si en France on continue dans ce sens. S'il est vrai que en arabie saoudite (KSA) nos femmes doivent être voilée (Abaya et Voile simple) ainsi qu'en Iran (Voile simple uniquement), aux UAE la tenue vestimentaire est "libre". Le voile n'est pas obligatoire pour les expatriés, et les jupes courtes ainsi que les décoletés pigeonnant fleurissent ! Les femmes de mon entourage apprécient largement cette tolérance...

Je serais franchement extrèmement embarrassé vis à vis de mes amis Emiratis, si notre pays des libertés devenait moins tolérant qu'un état islamique, fusse modéré...

je pense que la solution n'est pas aussi simple, et qu'il serait de bon ton que nos politiques deviennent un peu plus adultes et réfléchissent un peu plus leur prises de positions sur ce type de sujet sensible... A moins qu'il ne s'agissent qu'un élément de plus dans "The great war of civilization" pour reprendre le titre du livre de Robert Fisk....

Cordialement,

Marc

JeFaisPeurALaFoule a dit…

Qu'on soit d'accord sur tout ou partie de tes propos, je te remercie pour ces précisions et commentaires. Il y a là de quoi lire, et c'est agréable de constater qu'il existe encore des gens capables de discuter et d'exprimer autre chose que des grognements dire des pires bêtes...

En l'espèce: merci.

Après, j'éviterai d'entrer dans la polémique sur certains points où nous ne sommes pas du tout d'accord, mais c'est le jeu même d'accepter l'expression des autres idées!

Magali a dit…

Merci beaucoup pour ce billet qui me redonne espoir, il existe des gens "humains" encore...

Le monde me fait peur quand je vois le genre d'individus qui le peuple.

Me voilà rassurée.

En attendant je pense que c'est un phénomène typiquement français ou Européen que de dédaigner les personnes responsables de notre sécurité.

Au Japon, on a tellement de respect de l'uniforme.
Bon, nous avons d'autres problèmes, pas forcément moins grave...

Très beaux écrits en tout ça, c'est le premier blog sans photos que je parcours vraiment sincèrement!

Bien à vous.

JeFaisPeurALaFoule a dit…

Merci pour ce commentaire qui me fait évidemment très plaisir.

J'aime le Japon, j'en apprécie la culture et "l'intelligence" de vie, à savoir de mêler passé et avenir avec bon sens... Mais, comme toutes les sociétés, le Japon pâtit d'autres problèmes identitaires, de nationalisme, de gestion de la jeunesse qui, pour se libérer, se fait exubérante.

De là, je pense qu'être fier de soi et de sa patrie, c'est l'essence même de la vie en communauté. Etre fier, ça ne veut pas dire que les autres sont mauvais ou même moins bon, c'est surtout cesser de tout accepter n'importe comment, et d'avoir l'orgueil de dire "avançons ensemble".

Merci pour ton billet. Je suis flatté de ton commentaire.

Bien à toi.