16 mars 2011

Grandeur

Ce n’est que trop rarement que nous soupçonnons la grandeur que peut receler l’être humain. Bien souvent, c’est plus son côté imbécile et malsain qui prédominent et qui, hélas, font les beaux jours des journaux qui devraient se renommer poubelles du monde. J’aimerais tant qu’on mette aussi en avant le courage et l’abnégation dont certains arrivent à faire preuve dans les pires épreuves. Ainsi, nous aurions alors de vrais modèles à enseigner à nos enfants, et pas des braillards en costume qui se pavanent dans nos petits écrans. La réussite, c’est aujourd’hui d’être riche, quitte à faire n’importe quoi, alors qu’à mes yeux, c’est plutôt avoir réussi son existence qui est important. Et autour de nous, les exemples ne manquent pourtant pas ! C’est à croire que nous vouons un culte au futile, dont les divinités seraient la bêtise et l’égocentrisme.

Je n’aime pas trop fonctionner par clichés, mais l’un d’eux reste à mes yeux le plus riche et le plus fort, et c’est celui de Rocky Balboa. Quoi qu’on en pense, qu’on aime ou pas la boxe, ce personnage de fiction a vu naître des vocations, et il a démontré que la détermination et le courage ne sont pas des valeurs inutiles. Un type ordinaire, apparemment pas très malin, juste bon à utiliser ses poings pour vivre, prouve à la face du monde que le courage mène à la victoire. J’aime ce symbole, car il véhicule l’idée forte que rien n’est inaccessible, mais que cela s’obtient aussi aux prix de gros efforts. C’est gratifiant de réussir, surtout de se souvenir à quel prix nous parvenons à nos fins. Je suis fermement convaincu que ces valeurs devraient être mises en avant, et pas juste des stars temporaires qui n’ont d’autre talent que celui de faire le pitre en public sans avoir honte de soi. Oui, c’est vrai, je suis dur avec ces gens là, mais je ne leur envierai jamais le destin d’avoir l’air débile à la face du public. J’envie plus la volonté d’un personnage de fiction qui a su se sortir de l’anonymat à la seule force de son courage. Ca, c’est du cœur, ça, c’est un homme comme il en faudrait plus.

Cependant, nul besoin d’aller fouiller dans les médias pour trouver de tels personnages. Depuis celui qui se lève tous les matins pour aller à la mine, jusqu’à celle qui passe ses nuits à veiller des patients dans un hôpital, ils ont tous un sens fort du devoir et du cœur. Un « super-héros », c’est monsieur ou madame tout le monde, votre voisin, votre amie, quelqu’un de votre famille, des personnes qui ne se laissent pas abattre au premier obstacle. La vertu d’être soi-même, c’est avant tout de se tenir debout face à la Vie. La force de caractère de ces gens m’impressionne, car je me sens alors tout petit face à eux. Ils avancent, ils font des métiers que beaucoup refuseraient de faire, soit parce qu’ils sont dangereux, soit parce qu’ils sont durs moralement. Le pompier, le policier, le militaire, l’infirmière, la mère célibataire, tous ont de quoi nous en remontrer sur ce qu’est le courage au quotidien. Oui, c’est cliché de dire cela, oui, c’est un cliché éculé que d’aller mettre en avant la vertu, mais après tout, je préfère être cliché que d’avoir perdu tout sens des valeurs humaines.

Les héros ordinaires sont souvent des êtres qui se sacrifient sans se préoccuper de leur propre sort. On a vu des gens donner leur vie pour sauver les autres, tout en ayant pleinement conscience des risques. Il suffit de songer à celles et ceux qui ont luttés autour de Tchernobyl, car c’est bien d’une bataille dont il s’agissait. Beaucoup sont morts, et peu sont encore là pour raconter une histoire bien triste, mais pleine d’espoir. Ils sont morts en sachant qu’ils avaient agi pour le bien de tous. Ils ont donné une leçon de vie au monde entier. Ils ne sont pas morts en vain. Les techniciens de Fukushima agissent certainement avec la même conscience des risques qu’ils côtoient, et je les salue pour ce courage démesuré, ce sens du devoir et du sacrifice. Je ne sais pas si je serais capable d’en faire autant, je n’ai pas cette prétention de me croire aussi courageux qu’eux.

Les pires épreuves révèlent les qualités humaines de certains. Si seulement quelques uns arrivent à enseigner aux autres le sens du partage, de la volonté commune, et donc de vivre en harmonie malgré les horreurs de la vie, alors peut-être pouvons nous rêver d’un avenir enfin meilleur. Nous savons tous à quel point le destin peut être cruel, à quel point il peut se jouer de nos rêves les plus ordinaires. Certains proches meurent trop tôt, d’autres sont mutilés, handicapés, des amis partent, mais d’autres arrivent, des naissances nous rappellent à l’ordre et nous regardons devant nous, au lieu de nous lamenter sur notre pauvre sort. Nous avons cette chance inouïe que la Vie n’est pas éternelle. Pourquoi ? Certains me diraient, en effet, que c’est un contresens, et que la Mort est triste. C’est tout le contraire : nous devons pleinement aimer la Vie parce que, justement, elle est trop précieuse pour être gâchée. On se doit d’avancer, vaille que vaille, et de se donner pleinement aux causes et aux gens.

La tiédeur de cœur, c’est la défaite de l’espoir. La tiédeur de volonté, c’est la victoire de la Mort sur la Vie. La tiédeur de conviction, c’est la mort du courage. Ce n’est qu’en marchant d’un même pas déterminé que nous pouvons choisir, pour tous, nous nous-mêmes, une voie de progrès tant moral que social. Abandonner ne serait alors qu’une preuve de notre propre inutilité, et que nous méritons alors un destin tel que la mort. Car, après tout, toute vie est sanctionnée par une fin, qu’elle soit belle ou non. L’essentiel, c’est d’avoir bien agi entre notre naissance et notre mort.

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