26 octobre 2011

Aigreurs d’estomac

Je pensais être trop cynique, trop dur avec mes contemporains, et encore plus bien trop alarmistes concernant le comportement de l’Homme en général. En effet, sous le masque confortable de l’humour noir, j’ai pu, et ce à de nombreuses reprises, râler contre à peu près tous les travers possibles de notre humanité corrompue. Pourtant, tout comme mon Maître à penser (que vous connaissez sûrement si vous me lisez depuis suffisamment longtemps), j’ai maintenu une sorte d’amour inconditionnel pour l’individu face au groupe, tant parce que cela s’avère rassurant pour pouvoir avoir des sentiments (sauf à devenir un sociopathe… Et moi et les médicaments, hein…), que parce qu’il faut savoir accepter le fait que certaines personnes sont exceptionnellement dotées au niveau cœur et/ou esprit. Hé oui : votre serviteur est un colérique, un roi de la mauvaise foi, bref un emmerdeur qui se targue de pousser des gueulantes si possible à bon escient.

Mais c’est là que ça déconne ! Les deux années passées démontrent, et ce avec un nombre d’exemples « grandioses » (comprendre par là affolant) que l’Homme n’aura jamais tari la source de ses ennuis, à savoir son imagination. Ainsi, il faut faire preuve d’un esprit tout particulièrement retors pour, en vrac : pondre des placements qu’on sait foireux, et en plus les vendre en masse, provoquer sciemment des crises politiques pour déclarer des guerres menant à des échecs pourtant latents, ou encore laisser les discours sécuritaires gangréner la société, à tel point que le concept de vigilante revienne au galop. Comme quoi, ça ne suffit pas d’être foncièrement masochiste, il faut en plus aller chercher les problèmes. Il y a bel et bien une différence : le masochiste aime être maltraité, l’Homme, lui, va jusqu’à se créer des problèmes pour avoir le loisir de s’en dépêtrer. Serait-ce un nouveau concept de jeu de rôles ?

Et là, face à nous, il y a des types qui espèrent. Ils sont pas si nombreux, ils veulent un monde meilleur, plus propre, plus respectueux de l’existence, et qui, finalement, se prennent constamment des claques, par la faute d’une humanité trop empressée à critiquer au lieu de prendre les bonnes idées. C’est sûr, confronter quelqu’un parlant de générosité à un banquier aussi cynique que dévoué à la cause Argent, c’est envoyer le candide à la mort, ou tout du moins droit dans le mur, le tout sans ceinture ni airbag. La gentillesse a bien du mal à se faire une place là où l’ironie, la brutalité et l’opportunisme sont des règles de vie, voire de survie. Difficile d’expliquer à un type exploitant la forêt vierge au Brésil qu’il détruit mère Nature, quand cet emploi est sa seule source de revenus…

Ne raillons cependant pas trop vite les candides qui, parce qu’ils aiment la vie, les fleurs, les bisounours et tutti quanti, espèrent encore que l’Homme se tire de sa crasse pour faire quelque-chose d’enfin digne de son intelligence légèrement développée. Il ne faut pas s’en moquer, non parce qu’ils croient en la réussite de leurs idées, car là ils se prennent systématiquement une baffe à la lumière de la réalité, mais uniquement parce qu’ils entretiennent une part de rêve ! Rêver, cela donne l’occasion d’avoir des idées, de l’espoir, bref de quoi sauver l’âme. Evidemment que je les moque avec tendresse, bien sûr que je les taquine sans vergogne, quitte à les pousser à se mettre en colère… Et pourtant, je les adore, je les admire. Grâce à eux, on a encore l’idée d’avoir la tête dans les étoiles, d’avoir un fond agréable de douceur au milieu d’un monde qui aime visiblement à s’autodétruire. Continuez les gars, vous êtes un véritable soin pour mes douleurs d’estomac.

Bien sûr qu’on devrait rêver ! C’est même une des choses qu’on oublie d’enseigner à l’école ! On enfourne un paquet d’inepties dans le crâne des gamins, ensuite on enfourne des pelletés de préjugés juste bons à les détourner des réalités, et au final, on en fait des abrutis à peine capables de comprendre les fondamentaux du monde qui les entoure. C’est amusant de voir que l’anar de 18 ans devient un électeur de la droite « dure » à 30… Que s’est-il donc passé entre les deux ? Il a perdu sa candeur, a constaté que ses rêves étaient ceux qu’on lui avait engouffré dans la boîte à réfléchir, et qu’ensuite, par dépit, il a choisi le contraire de son éducation politique. Pourquoi ? Par défiance tant que par déception. Alors, au lieu de bourrer le mou aux étudiants, si on leur disait la vérité, tout en leur rappelant qu’ils sont responsables de leur présent, et surtout de leur futur, m’est avis qu’on aurait énormément moins d’ulcères à l’estomac (dont le mien que je travaille avec une incommensurable patience et détermination).

Finalement, je me soigne la brioche avec mon entourage. Certains sont aussi pénibles que moi, aussi déterminés à se moquer du monde entier. D’autres sont, au contraire, des preuves vivantes qu’on peut rêver, aimer, vivre avec le sourire. Et là, j’ai mon équilibre, je change le Ph de mon estomac, et miraculeusement, je me sens bien. Et si nous en faisions tous autant ?

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