18 novembre 2013

On est tous racistes

Disons le tout de suite, cette affirmation doit en faire souffrir plus d'un parmi ceux qui me liront. C'est méchant, direct, aussi brutal qu'une bonne baffe en pleine tronche, et tout aussi susceptible de fouetter le sang. Pourtant, quoi de plus vrai que cette affirmation, quoi de plus tangible que cette réalité quotidienne qui arrive même à empoisonner la vie des politiques? Aussi absurde et indécent que puisse être cette réalité, nous le sommes tous, le racisme n'étant que le reflet d'un mauvais fond dont chaque être humain dispose: la méchanceté gratuite.

Alors oui, on va me citer des humanistes et des saints pour me dire "Et eux?". Je vois d'ici la liste: Mère Térésa, Gandhi, Coluche, et j'en passe. Dites les gens, sont-ils un modèle classique, ou sont-ils connus parce qu'ils sont exceptionnels justement? Interrogez-vous un peu sur cette vérité avant de pontifier sur l'humanisme du quidam. Tous, oui tous nous avons un fond de méchanceté, de xénophobie, de clichés infects qui nous collent à la peau. Qu'on le veuille ou non, qu'on soit complètement convaincus de tels clichés minables, ou juste imprégnés d'une culture populaire décadente, force est de constater que le "Arabe voleur", "Rom escroc aux allocs", "chinetoque bosseur et magouilleur", ou encore "Portos maçon/plombier" a la peau très dure. Difficile à digérer comme vérité, non? Parce que oui, on se dit tous qu'on a un pote jaune qui n'a rien du cliché précité, ou encore tous une copine au teint basané qui est une salariée zélée et une mère idéale... Mais n'a-t-on pas tous dit un jour "bougnoule", "négro", ou encore "nouache"? Si?

Le racisme est une chose contre quoi il est difficile de lutter, d'autant plus quand l'époque est à la crainte pour son avenir plus qu'à l'embellie "American way of life". On n'est plus à fantasmer sur la troisième bagnole, sur la climatisation dans la maison avec gazon vert fluo, mais bel et bien à avoir peur du péril jaune avec les usines délocalisées, du chômage de longue durée, de la précarité, ou encore de l'avenir plus que douteux pour nos descendants. C'est ainsi: quand on vit dans la peur du lendemain, il faut un ennemi, qu'il soit tangible comme l'étranger, ou intangible comme une "classe sociale". Par le passé, on a collé l'ennemi sur l'immigré, en l'accusant de piquer des places aux "pauvres ouvriers Français qui veulent avoir leur place", à "Ces salopards de banquiers mondiaux qui font couler nos boîtes". Dites, les mecs, dans les deux cas vous ne regardez pas ce que vous êtes, ce que vous avez obtenus (ni comment d'ailleurs), mais sur qui rejeter la responsabilité. On vit en collectivité, non? De là, rien de surprenant qu'on en arrive à des cris de singe pour moquer un membre du gouvernement...

Arrivés à une telle situation, nous sommes comme une bande de touristes largués au milieu d'un pays hostile sans un guide pour les emmener vers l'hôtel. Entre les taxis craignos qui vous font les poches, les vendeurs de babioles pour pigeons d'étrangers, on regarde tous la route et les panneaux en se disant "Mais c'est vers où, le bonheur?". Sous votre nez les enfants! Ce n'est pas en maltraitant un ennemi fantasmé, une différence de couleur et/ou de foi que vous obtiendrez la collaboration des gens qui vous entourent. Le monde n'est hostile que parce que nous l'abordons comme tel. L'homme est un animal agressif, et en réponse nous agissons comme des hyènes, prêts à mordre en défense. La haine raciale, qu'elle soit revendiquée, ou juste suggérée, n'est pas tant le symptôme d'une société qui va mal, que d'une humanité qui a toujours besoin de trouver quelque-chose à cibler pour se défausser de sa propre faiblesse. Quand des débiles crient comme des singes, c'est avant tout pour démontrer, et ce très involontairement, qu'ils sont encore plus stupides que ne le laisse entendre leurs positions politiques. La bêtise, l'incapacité à progresser moralement, ce sont des choses qui ont toujours été, et qui hélas seront toujours parmi nos tares premières. L'homme est fondamentalement con, et s'en offusquer l'est plus encore.

Je sens que certains se sentent alors insultés, traités de cons, d'abrutis, étiquetés avec des épithètes peu glorieux. Arrêtez de jouer les saints, remballez les vestes confortables, et adoptez le vrai profil de l'homme, avec son éclat et sa crasse mêlés. Nous sommes tous ainsi, oscillant entre le meilleur et le pire, en ayant des idéaux, des rêves, mais aussi des clichés littéralement soudés à notre âme, des propos intolérables dans la tête. Certains vont jusqu'à les revendiquer, tandis que d'autres ont juste la lâcheté suffisante pour ne pas le faire à haute voix. Nous sommes tous racistes, parce que nous avons peur de l'autre, nous avons peur de la différence, du progrès, des changements sociaux. Le temps où le "noir" était moins qu'un animal domestique aux USA n'est pas si lointain, le temps où l'Afrique du sud avaient des transports séparés par couleur de peau non plus, pas plus qu'il est si loin que ça le temps où l'idée même de mixité de couleur dans les écoles faisaient hurler les puritains. Les temps changent? Vous êtes sûrs? Vous pensez sincèrement que ce monde a progressé? Certains pays prétendent avoir fait de grands pas en avant... mais à quel prix! Les USA ont été tenus de changer, vue la taille de la communauté "non blanche"; L'Afrique du sud avait le choix entre une guerre civile (avec la mort programmée des blancs très minoritaires en population), et effectuer une transition intelligente et surtout inévitable. Ce sont les circonstances qui déterminent ces progrès, plus qu'une véritable volonté de changer.

Ca n'empêche pas pour autant d'être scandalisé de l'attitude indigne de certains, pas plus que cela ne doit cautionner les actes liés à cette xénophobie. Comme je viens de le marteler, il y a nous, la masse, les majoritaires qui ont des clichés dans la tête, et les autres, les convaincus, les vindicatifs qui annoncent clairement la couleur (ou les trois couleurs? Là j'ironise évidemment). Quoi que vous fassiez, cela ne changera pas, cela existera, résistera au temps, aux démonstrations historiques, aux progrès de la science ou du système éducatif. Le racisme est et sera toujours notre handicap social majeur, et le réduire devra avant tout passer par une meilleure compréhension de l'autre.
Seulement voilà, le quotidien nous démontre tout le contraire: communautarisme religieux pour retrouver ses racines, communautarisme intellectuel allant jusqu'à créer un esprit de classe (Ah ces cons de bobos qui pensent avoir le côté gauche de l'intellectuel, et le côté droit de l'ambitieux!), et tout récemment -pour moi- un mélange étrange entre les deux via un site de rencontres dédiés... aux juifs. Pardon de vous le dire les gens: vous êtes encore plus cons que je ne le craignais! Comment demander le respect des autres quand soi-même on va jusqu'à exclure les autres de ses relations? Comment peut-on demander la paix quand on cultive le sectarisme et le choix social par la foi? Si ce n'est pas une forme de xénophobie, je ne sais pas ce que c'est! J'ai déjà en horreur le concept même de réseau social, mais de là à pousser jusqu'à faire des rencontres uniquement sur un critère religieux, j'ai dans l'idée que je ne serai pas le seul à trouver ça non seulement inepte, mais en plus dangereux. Car oui, c'est dangereux à plus d'un titre: que revendiquaient les nazis comme reproches aux juifs? Dans la liste, il y avait ce côté communauté trop fermée aux autres, refusant l'intégration sociale. N'est-ce pas là un exemple flagrant allant dans le sens de ces monstres à croix gammée? Et puis surtout, petite question cruelle sur le fond aux adhérents de ces services hyper ciblés: êtes-vous plus Français que juifs, ou l'inverse? Pensez-vous participer à la vie de la nation, ou vivez-vous en marge d'elle? Ces réponses peuvent dicter l'avenir, du moins je le pense... Et puis enfin, une réflexion me vient: comment quelqu'un qui adhère ainsi à une sélection par la foi peut-il avoir le droit de critiquer ce même mode de fonctionnement pour une autre religion? Peut-on alors décemment dire "Les musulmans n'ont pas à se réunir comme ils le font, c'est du communautarisme dangereux", tout en le faisant soi-même...

Racistes? Tous racistes, tous égaux devant la connerie humaine. Je le dis, le revendique, je ne vaux pas mieux que les autres, mais au moins une chose peut m'en distinguer: je ferai mon possible pour m'en débarrasser autant que faire se peut. Le monstre raciste est en chacun de nous, c'est un poison qui nous contaminera toujours... Faites en sorte qu'il ne soit pas un jour si présent qu'il devienne non pas un cliché réflexe, mais bel et bien une idée ancrée en nous. Se battre contre? "SOS Racisme"? Non. J'exige simplement qu'on apprenne à se respecter, si nécessaire à se craindre mutuellement, à la seule condition que ce soit pour de vraies raisons morale, politiques, ou économiques, mais certainement pour une différence de couleur ou de convictions religieuses. Rien que ça, déjà, permettra qu'on ne lance plus un cri de singe à un tel niveau élevé de l'état.

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